H.U.Rudel dans "Pilote de Stukas", chapitre "Noël 1944" p° 237 :
"Un soir, le ministre Speer m'apporte, de la part du Führer, une nouvelle mission à étudier. Le Führer a l'intention de monter des attaques contre les barrages hydro-électriques alimentants les établissements industriels de l'Oural. Il espère ainsi réduire considérablement le potentiel des fabrications d'armements, en particulier ralentir la fabrication des chars. Il compte utiliser d'une manière décisve, au cours de cette année, l'avantage qui nous sera ainsi procuré. Il vous charge d'organiser ces attaques; Vous ne devrez pas voler vous-m, le Führer l'a encore défendu expressément. Je fais comprendre au ministre qu'il existe pour cette besogne des gens beaucoup plus qualifiés que moi, dans le personnel de l'aviation à grand rayon d'action en particulier. Ils sont beaucoup plus familiers que moi avec des choses comme la navigation astronomique, par exemple. Je suis uniquement un spécialiste des stukas, et n'ai guère d'expérience en dehors de ce problème. ...
Le Führer tient à ce que ce soit vous qui vous en chargiez, insista Speer. Je pose un certain nombre de questions d'ordre technique. Avec quels appareils et avec quelles bombes exécuterons nous ces attaques ? Si l'opération doit être prochaine, il ne peut être que des Heinkel 177, bien que l'on ne puisse pas considérer qu'ils ne soient pas tout à fait aptes à ce genre de mission, et que leurs essais ne soient pas complètements terminés. Comme bombe, on ne peut utiliser, à mon avis, qu'une sorte de torpille, mais elle est également en essai. Il me propose les bombes d'une tonne que je repousse catégoriquement, car on ne peut en attendre aucun succès; Je montre au ministre des photographies prises sur une partie septentrionale du front russe, où j'ai jeté des bombes de ce genre sur les piles en béton des ponts de la Néva sans parvenir à les détruire. Cette question des bombes est donc encore à régler. ... Puis j'examine avec grand intérêt les photographies prises dans les régions industrielles en cause et constate que les établissements sont souterrains pour une partie importante. Beaucoup d'usines sont donc à l'abri des attaques aériennes. Les photographies montrent les barrages et les centrales hydro-électriques et, partiellement, les usines elles-mêmes. Elles ont été prises pendant la guerre. Comment a-t-on pu se les procurer? J'arrive à me l'imaginer en me rappelant le temps où j'étais en Crimée. Lorsque je me trouvais à Sarabous et que, ..., je voyais assez fréquemment atterir un appareil peint en noir. De mystérieux passagers s'y embarquaient...
Des prêtres russes, avec leur longue barbe et leur robe sacerdotale, originaires des pays du Caucase, où l'on aime la liberté, s'embarquaient souvent, afin d'aller remplir volontairement des missions importantes pour le compte du commandement allemand. Ils portaient sur la poitrine un petit paquet : appareil photographique ou explosif suivant la mission. Ils voyaient dans la victoire allemande la seule possibilité de retrouver leur indépendance et, par conséquent, le droit de pratiquer librement leur religion. C'étaient des combattants fanatiques de la liberté contre le bolchevisme mondial, c'étaient des hommes à barbes blanches, aux traits racés, à l'allure sculpturale. Ils rapportaient des renseignements de toutes sortes des régions les plus lointaines de la Russie après être restés absents pendant des mois. Il en disparaissait aussi fréquemment, soit en sautant en parachute, soit en essayant d'accomplir leur mission, soit en essayant de franchir le front au retour...